L'expert judiciaire, médiateur spécialisé en cas de litige
Quand un devis ou un contrat a été mal rédigé, un désaccord peut survenir et devenir conflictuel. Expert dans la filière du paysage, Freddy Pouteau aide à se comprendre ou à se défendre.
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Un dysfonctionnement dans un système d'arrosage automatique. Une pose de gazon de placage suivie d'un mauvais entretien. Une malfaçon. Des arbres qui n'ont pas résisté ou des plantes qui ne donnent pas satisfaction. Un refus de payer à la livraison de travaux malgré des garanties signées. Une qualité déficiente de terreau. Une dette qui met en péril la survie d'une entreprise. Ce sont autant de situations susceptibles de rendre très difficiles les relations entre une entreprise de paysage ou une pépinière et leurs clients. Malgré les chartes de qualité, il y a parfois des discussions qui s'engagent mal, surtout lors du paiement. Ou avec un expert d'assurance s'il refuse une indemnisation. De plus, en temps de crise, les litiges sont plus fréquents. Selon le droit, nous avons tort ou raison. Dans les situations les plus floues, la jurisprudence a pu donner des indications de résolution. Mais parfois, le problème relève de compétences très spécialisées. Entre alors en jeu l'expert judiciaire... quand il existe dans le domaine concerné. Freddy Pouteau est de ceux-là, au départ pour résoudre ses problèmes au titre d'entrepreneur du paysage. « Mais aussi pour aider les autres, parce qu'il y a peu d'experts dans la filière du paysage, en région comme au niveau national. »
L'importance d'un devis bien rédigé...
L'existence des experts judiciaires est plutôt mal connue. Cela paraît souvent compliqué de se défendre seul. « Les demandes viennent à moi par des connaissances ou des clients. Or, il est possible de régler beaucoup de problèmes concernant les chantiers de paysage. Une expertise commence par un devis précis lié à la mission que l'on me confie. Je l'établis à la suite d'un entretien téléphonique approfondi. Je dois comprendre l'ampleur du problème, ce que je peux faire ou non. Mon rôle sera de proposer une solution (si possible à l'amiable) ou un compromis, de façon à éviter une procédure juridique ou civile longue, ou même le pénal. J'interviens en tant que conseiller technique, sur un point précis, auprès d'une instance. Je conseille ou j'agis à la demande d'un juge, d'un avocat, d'un autre expert judiciaire. Ou je défends les intérêts d'une personne ou d'une entreprise. Il faut donc être capable de faire une bonne expertise sur une problématique particulière. Il faut aller voir sur le terrain et savoir estimer la valeur d'un préjudice. Je dois être le plus impartial possible et me référer aux faits et constats techniques, stricto sensu. Et, si besoin dans des domaines encore plus pointus, je peux faire appel à ceux que l'on appelle des « sapiteurs » : je suis paysagiste et ex-pépiniériste, mais j'ai parfois besoin de trouver les critères infaillibles afin d'estimer lavraie valeur d'un arbre coupé accidentellement, ou la dangerosité d'un arbre ciblé dans un espace public... » L'expert judiciaire doit procéder de façon à ce que les choses se passent bien.
« Généralement, il faudrait mieux anticiper et les devis sont trop souvent mal rédigés et pas assez précis, tout simplement », regrette Freddy Pouteau. « Le cahier des charges n'est pas suffisant. Un bon devis doit anticiper 90 % des problèmes les plus courants et prévoir les clauses de sortie. Il peut contenir une page de cahier des charges et trois pages de conditions. Il faut savoir où on va, avec qui, et comment. C'est possible et ce contrat d'engagement, bien préparé, devient un facteur de confiance et un bon outil de vente. De même, si un devis de prestation (ou de plantation pour une pépinière) n'est pas clair ni rigoureux, et si le travail a été moyennement réalisé, je suis incapable d'aider, encore moins de défendre. Par ailleurs, il faut veiller à faire signer, en fin de chantier ou après chaque livraison, un procès-verbal de réception ou un bon de livraison. »
L'expert judiciaire a appris un minimum le fonctionnement de la justice : vocabulaire spécifique, façons de rédiger et de s'exprimer, d'argumenter dans les règles de l'art du droit, démarches à suivre... et fautes de procédure à éviter. Il est à même de comprendre les problématiques du droit, comment se comporter dans une procédure contradictoire. Sa présence peut donner plus de poids. Il doit pouvoir aider un magistrat et les parties à comprendre les contours du litige.
Outre des bases en comptabilité et gestion, il faudrait que les formations horticoles et en paysage intègrent davantage les notions de commerce et de droit. « On ne peut plus se passer du droit. J'en parle lorsque j'ai l'occasion de présenter mon métier de paysagiste dans les lycées et les écoles supérieures. Et il faudrait que d'autres acteurs du paysage se forment à être experts judiciaires. Il n'y en a vraiment pas suffisamment. »
Odile Maillard
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